Don’t look up, regardez le drapeau (et écoutez les insultes)
Dès le début de l’année, Emmanuel Macron a délibérément déclenché une polémique stérile sur le drapeau européen. Avant d’en produire une autre encore plus violente avec son “envie d’emmerder” les non vaccinés. Mépriser et caricaturer sont les meilleures armes du Président pour imposer ses termes du débat dans la campagne présidentielle. Et occulter les véritables enjeux qui ne sont clairement pas à son avantage.
Pour lancer la présidence française du Conseil de l’Union européenne - comprendre, annoncer à la population que le sauveur de l’Europe reprend du service - Macron a fait flotter un drapeau européen sous l’arc de Triomphe. Déclenchant une polémique alimentée par l’extrême droite et Valérie Pécresse. Plutôt que de se saisir de l’opportunité historique de cette présidence française - qui ne se présente qu’une fois tous les 14 ans, pour proposer un changement de cap en Europe. Alors que nous sommes nombreuses et nombreux à avoir profité des fêtes pour regarder Don’t look up, métaphore glaçante de la folie du capitalisme et du déni de la crise climatique, commencer 2022 avec une polémique sur le drapeau européen a de quoi désespérer.
Cette polémique est révélatrice de la pratique du pouvoir d’Emmanuel Macron. Son objectif n’est pas de présider un pays, tel qu’il est, dans la diversité de ses sensibilités, mais de créer des blocs. Ces blocs sont voués à s’affronter dans un combat qui ne sert que l’agenda d’Emmanuel Macron. De la même manière que le président se défausse de toute responsabilité sanitaire sur les non vaccinés en les insultant avec des propos irresponsables produisant des fractures dangereuses, Macron veut enfermer le débat sur la politique européenne dans une opposition entre “pro” et “anti’. Il sait parfaitement que l’Union européenne est source de clivages très forts dans notre pays et veut les utiliser pour imposer un faux tableau : lui ou le Frexit.
En vérité, Macron n’en a rien à faire du devenir des peuples européens, pas plus que de la misère et du désespoir grandissant dans son pays. Sa seule obsession ? Redorer son blason en vue de l’élection présidentielle pour faire oublier ses 5 ans d’échecs en Europe. C’est ce que Macron veut occulter avec ses agitations de drapeau : son bilan est désastreux. Lui qui faisait mine de vouloir atténuer les politiques d’austérité a accepté de conditionner le plan de relance à des réformes structurelles. Il a accepté les rabais budgétaires des Etats radins. Lui qui prétendait défendre les droits fondamentaux a regardé ses pieds face à l’extrême droite autoritaire qui triomphe en Pologne, en Hongrie, en Slovénie. Lui qui nous bassine avec sa soi-disant "grande cause du quinquennat" sur l’égalité femmes hommes a combattu un texte de progrès sur le congé parental. Pire encore, Macron nous déshonore avec des alliances qui font honte à la France : avec le MEDEF contre la transparence fiscale des multinationales, avec les pays gaziers et l’extrême droite pour défendre le nucléaire. Même la présidence française du Conseil est un doigt d’honneur à nos partenaires, tant il ne se cache pas de l’instrumentaliser à des fins électorales.
Ne tombons pas dans le piège que nous tend Emmanuel Macron et qui arrange bien l’extrême droite. Et je le dis aussi au reste de la gauche. Pour notre part, notre position est claire : nous assumons d’être les héritiers de celles et ceux qui ont dit non en 2005. Pas non au principe de coopération européenne mais non à l’obsession du marché dérégulé et de la concurrence à tout prix, surtout au prix de la planète et de nos vies. Nous assumons de dire, comme le sérieux l’exige, que de nombreuses règles et politiques européennes actuelles sont tout simplement incompatibles avec le programme de rupture que nous défendons. Nous assumons de dire que, oui notre programme sera appliqué d’un bout à l’autre, que nous désobéirons à toutes les dispositions européennes qui s’opposent à l’application de ce programme et que nous mettrons tout le poids de la France dans le rapport de force et les négociations nécessaires à la mise en oeuvre de ce programme.
Et nous disons cela tout en nous inscrivant dans l’histoire de l’internationalisme, en ouvrant notre cœur à toutes les coopérations internationales qui améliorent les conditions de vie et nous permettent de faire face ensemble aux défis communs. Il nous restera trois mois de Présidence française de l’UE une fois arrivés au pouvoir en avril 2022. Trois mois pour empêcher le retour des règles austéritaires suspendues depuis le début de la pandémie. 3 mois pour que la France ouvre une voie d’espoir en montrant que la religion néolibérale n’est en rien une fatalité.